Et le 1er prix de la critique revient à ….RÉMY LYSCAR (1A)

 La classe de 1A a participé cette année au Prix Jean Renoir des Lycéens, qui consiste à faire élire chaque année par des lycéens de toute la France le meilleur film parmi une sélection de 7 longs métrages sortis dans l’année.

A cause de la crise du Covid 19 le dispositif n’a malheureusement pu être mené à terme, mais les élèves ont quand même pu voir 6 des 7 films sélectionnés, et en rédiger des critiques, publiées sur le site du PJRL https://eduscol.education.fr/pjrl

Un jury, constitué de N.T. Binh (Positif) et Thierry Méranger (Cahiers du cinéma), a néanmoins pu désigner les lauréats du Prix de la critique 2020, et c’est un de nos élèves, Rémy Lyscar, qui a remporté le 1er prix avec sa très belle critique du long métrage It must be heaven, d’Elia Suleiman. (A lire ci-dessous)

Toutes nos félicitations à Rémy ainsi qu’à tous les élèves de 1A qui ont participé avec dynamisme et enthousiasme au dispositif !

1er PRIX   Rémy Lyscar , Lycée Maurice Genevoix de Montrouge

« Il y aura une Palestine, c’est certain ». Cette phrase est prononcée vers la fin du film par un voyant, qui s’adresse à̀ Elia Suleiman, réalisateur et acteur dans son propre film, ce qui offre une mise en abyme. En effet, cette Palestine
« must be heaven », cette Palestine sans conflit Israélo-Palestinien, sa Palestine, serait son Paradis, c’est en tout cas comme cela que j’interprète le titre du film. De plus, le voyant lui affirme que cette Palestine n’existera pas de son vivant, elle est donc semblable à un rêve ou à une croyance, qui ne peut intervenir qu’après la mort, comme le Paradis. Elia Suleiman semble donc courir après quelque chose d’inatteignable.

Pour cela, il fuit sa Palestine natale, à la recherche probablement d’une nouvelle identité, puisqu’il semble au début du film qu’il se sente étranger à sa vie au pays, une vie qui ne lui correspond plus. La preuve est qu’il ne comprend plus ses voisins, voleurs ou chasseurs, mais qui lui semblent absurdes et inintéressants (il ne prend d’ailleurs pas la peine de leur parler).

Néanmoins, peu importe où il va, que ce soit à Paris ou à New York, il semble que ce sentiment de solitude le suive ; un peu à l’image de l’Etranger de Camus, on a l’impression que rien ne l’affecte, que rien ne l’effraie, que rien ne lui fait plaisir. A son arrivée à Paris, par exemple, il paraît étonné et curieux de la société qu’il découvre, une société de la mode et de la culture (beaucoup plus que ne l’était la Palestine) sans pour autant y trouver un quelconque intérêt, ou alors un intérêt très éphémère. D’ailleurs, il reste étranger à tout ce qu’il voit, ne prenant qu’une fois la parole, pour dire au taxi qu’il est Palestinien : on sent à ce moment-là que sa nationalité est la seule chose qui compte vraiment à ses yeux, car son identité est la seule chose qu’il recherche vraiment tout au long du film, la seule chose à laquelle il n’est pas étranger.
Le film lui-même est également une belle mise en abyme. On assiste notamment à une rencontre avec un producteur français situé à Paris, qui fait comprendre à Elia Suleiman que son film est un très beau projet : on comprend alors concrètement qu’il s’agit d’une comédie de l’absurde sur la Palestine, ou encore sur le Monde. Malgré cela, le projet ne prendra pas forme car le film n’est pas assez « palestinien » selon le producteur (on peut y voir ici un message d’Elia Suleiman : cette absurdité s’applique au monde entier).
Pour conclure, je pense qu’Elia Suleiman a éprouvé le besoin de parler d’un monde qu’il trouve de plus en plus absurde, parodiant un grand nombre de métiers (de l’éboueur au policier). L’idée est intéressante, surtout que son œuvre laisse beaucoup réfléchir le spectateur sur sa propre vision du monde. Mais je n’ai pas pour autant trouvé que ce film passait un message clair, notamment parce qu’il pose beaucoup plus de questions qu’il ne propose de réponses. Cet aspect du film empêche à mon avis le spectateur de bien suivre son déroulement, et bien que le spectateur ait un rôle à jouer dans sa compréhension de l’œuvre, s’il est aussi peu aidé, il risque de s’y perdre.

Rémy Lyscar